Rien de plus facile aujourd'hui que d'ouvrir un robinet pour avoir de l'eau, mais ça n'a pas toujours été le cas. Nono Russ nous livre ses mémoires à ce sujet:
Lorsque Tardy de Montravel
découvre l’emplacement de Nouméa, il y trouve un magnifique plan d’eau
(de mer) mais déchantera plus tard du manque d’eau potable.
Les premiers occupants devront donc forer des puits et
également récupérer l’eau de pluie.
Un grand nombre de puits particuliers ou communs seront
forés en ville et dans les différents quartiers et notamment à la Vallée des
Colons où l’on en dénombre un grand nombre. L’eau de pluie sera récupérée par
les gouttières des toitures dans des « caisses à eau », souvent des
barriques ou foudres en bois , citernes en tôle galvanisée ondulée ou tôles
d’acier rivetées dont un superbe modèle peut être admiré à la Maison Célières.
L’eau de pluie n’étant pas minéralisé, l’intérieur des citernes est enduite de « lait de ciment ». Plus rares seront
les citernes en ciment.
Pendant les sécheresses, l’eau sera transportée et livrée
par des voitures à bœufs et notamment il me semble par Mr Blanchot.
Suite à l’installation de la conduite de Yahoué, dont
le débit ne sera souvent pas suffisant,
ces citernes seront équipées de robinets à flotteur pour un remplissage
même à petit débit (ou durant la nuit). L’eau arrivera en premier lieu au
bassin de « la Colline aux Oiseaux » près du Haussariat puis plus tard au Sémaphore, Mont Vénus et
ensuite sur les hauteurs des différents lotissements.
Il est à noter que les raccordements aux particuliers sont faits
avec des tuyaux en plomb et il en existe certainement encore. En effet, dans certains quartiers de Nouméa, le passage en PVC n'a eu lieu qu'il y a environ 10 à 15 ans lors de l’installation de nouvelles conduites.
En brousse, le branchement se fera au « creek »
soit directement ou par l’intermédiaire d’un bélier qui élèvera l’eau à
plusieurs fois la hauteur du captage. Il y aura aussi l’éolienne à partir du
puits ou à l’aide d’une pompe manuelle (ou plus tard motorisée).
Le puit comblé de Louise Michel à l'emplacement de la tache blanche. |
Lorsque j’habitais au Terminal de Ducos à la Baie des Dames
de 1962 à 1970, avant l’arrivée de la conduite vers 1965, nous n’utilisions que
de l’eau de pluie provenant d’un plan de 500 M2 en tôles d’acier installé par les Américains et qui alimentait 3 cuves de
100 000 l. Ces cuves étaient périodiquement nettoyées et repeintes au
lait de ciment
Par gravité ou par moto pompe, je remplissais une caisse à
eau installée plus haut derrière la maison. En bas, il y avait encore le puits (un
peu saumâtre) de Louise Michel qui me servait à alimenter mon élevage de
chèvres à l’aide d’une pompe manuelle double que les Néobridais appelaient :
"i pul i come, i push i go".
A la pointe Mâ, Mr Smith avait un puits dans lequel il
versait de temps à autre quelques kilos de clous (comme Bourvil et son eau
ferrugineuse). Il me racontait qu’il y gardait
également une anguille qui, en cas de sécheresse, remonte et assure le filet
d’eau qui alimente le puits.
Arnold Russ